lundi 16 mai 2011

Trois jours à Mandalay

Après une nuit difficile dans le bus (et quelques arrêts incongrus notamment à 1h du matin où l’on vous sort du bus en plein sommeil pour manger…) nous arrivons le 11 mai à Mandalay. Il est 5h du matin. Le temps de trouver un hôtel, de faire une sieste réparatrice, d’avaler un petit déjeuner et nous voilà dans la rue où nous louons deux vélos à un petit monsieur qui se trouve là au bon moment. Lequel bonhomme semble très attaché à ses bicyclettes tant il nous fait plusieurs fois la démonstration de comment mettre la béquille, comment attacher l’antivol, nous recommandant maintes fois de bien faire attention à la circulation, de revenir faire regonfler les pneus si nécessaire… etc etc.. Ou quelque chose dans notre attitude lui inspire la plus grande méfiance (et franchement je ne vois pas bien pourquoi…nous ne lui avons raconté aucune de nos péripéties précédentes !) ou alors c’est dans sa nature… Nous atterrissons ensuite sur le trottoir d’en face où nous avons repéré un café internet. Mission : lire nos mails et poster le texte du blog. En fait, je prépare le texte la veille sur Word afin d’avoir la ponctuation (car ici les claviers sont en birmans ou en qwerty), je sauvegarde sur une clé USB et ainsi parés nous allons nous connecter (enfin Edgar tripatouille tant et si bien que nous finissons par déjouer tous les pièges et accéder au site) et recopions le texte sur le blog directement. Je vous assure que c’est à chaque fois une sacrée épreuve…d’autant plus que les coupures de courant sont très très fréquentes dans tout le pays et particulièrement à Mandalay et quand ça arrive alors qu’il ne reste plus qu’à cliquer sur le bouton « envoyer », forcément, ça énerve ! Bref, nous sortons vainqueurs (enfin surtout Edgar car moi je suis plutôt spectatrice) et enfourchons nos vélos pour nous rendre dans le cœur de Mandalay au le palais royal. En effet, Mandalay fut capitale du royaume de Birmanie à la fin du 19ème siècle et d’importants monuments furent édifiés pendant cette période. C’est le cas du Palais Royal, vaste ensemble d’une centaine de bâtiments en teck, entourés de murailles en briques et de larges douves remplies d’eau. Certes ce que nous visitons est une reconstruction à l’identique (tout le palais a brûlé pendant la seconde guerre mondiale), faite dans les années 90 (et d’ailleurs sujette à controverse car réalisée à l’aide de travaux forcés) mais cela donne une bonne impression du faste de la cour et du type d’architecture en vogue à l’époque. Autant les averses d’Inlé rafraichissaient nos journées, ici, point une goutte d’eau à l’horizon (et je ne croise pas les doigts en tapant sur mon clavier moi !), il fait une chaleur terrible (33° le matin à 7h, 37°-40° en journée et 32° le soir, vérification faite sur la montre thermomètre/boussole d’Edgar). Heureusement, il y a partout des vendeurs ambulants de jus de fruits frais qui font notre délice (celui à l’ananas avec pulpe et jus de citron vert sur glace pilée est un pur délice… j’en ai même fait des photos..). Le lendemain, grande journée autour de la colline de Mandalay, qui surplombe la ville et lui a donné son nom. Du haut, vue imprenable et inévitable temple avec ses statues qu’il convient d’arroser régulièrement : ce dont se chargent Adélie et Calixte avec le plus grand empressement (le bouddhisme plait bien aux enfants : il y a pleins de rites qu’ils trouvent rigolos). Mandalay est une ville de pagodes et de monastères et plus de 50% des moines du pays y vivent. Nous croisons donc partout ces silhouettes enroulées dans des tissus bordeaux (et non plus jaune safran comme ailleurs en Asie du Sud Est) que se soit dans la ville, les temples ou les monastères qui sont de véritables lieux de vie où les moines dorment, mangent, étudient et prient. Le plus beau d’entre eux est le monastère de Shwenandaw ou Golden Palace Monastery, seul bâtiment original encore intact, tout en teck sculpté : une véritable splendeur. Le bois de teck est ici le matériau noble par excellence et j’y suis d’autant plus sensible que, lorsque je travaillais chez Lapeyre, le seul mot de« teck », provoquait un silence angoissé dans la salle depuis qu’une action spectaculaire de militants Greenpeace enchainés une journée entière aux portes d’un magasin pour protester contre l’importation de ce bois menacé, avait quelque peu écorné l’image de l’enseigne…à l’avenir, les chefs de produits concernés étaient priés de trouver des substituts… Mais là, ce n’est que teck partout et en quantité incroyable : des piliers énormes, des portes massives sculptées, des cloisons entières…c’est magnifique ! Le soir, nous entreprenons d’aller à un spectacle de marionnettes traditionnelles birmanes. Le théâtre est un peu loin, alors nous enfourchons nos vélos et partons dans la nuit, sans lumière avec juste l’éclairage publique, autant dire pas grand-chose. Comme nous ne sommes pas les seuls sans lumière, chaque croisement de routes est assez scabreux mais nous arrivons finalement au théâtre, où nous sommes…les seuls spectateurs !! Pourtant, il s’agit d’une troupe connue, recommandée dans tous les guides mais il est clair qu’il y a peu de touristes en Birmanie d’autant plus que c’est le début de la basse saison (nous avons vu, le matin, une européenne, de dos, en short dans une pagode et depuis plus rien). C’est toujours un peu gênant d’être deux à applaudir une troupe d’une douzaine d’artistes (6 musiciens et 6 marionnettistes) mais, comme me souffle Edgar, « si nous n’étions pas venus, ils auraient eu personne ». Certes, mais je regrette quand même un peu que nous ayons négocié les places gratuites pour les enfants…N’empêche, le spectacle est de qualité. Nous passons un agréable moment et sommes conquis par la gentillesse et la prévenance de la troupe, aux petits soins pour nous. Le lendemain, 13 mai, nous avons organisé une journée de visites en dehors de Mandalay, dans les « anciennes capitales », redevenues de petits villages tranquilles en pleine campagne. Mais il reste quelques vestiges intéressants et la promenade vaut surtout pour les paysages qu’elle nous offre. Pour cela, nous avons négocié avec un chauffeur de taxi local pour qu’il nous promène toute la journée. Rien que le taxi est extraordinaire : c’est une toute petite voiture en tôle bleue, avec l’arrière aménagé en pick up couvert. Une Mazda de 60 ans (oui, oui vous avez bien lu : 60 ans !) qui ne roule pas bien vite avec un bruit de 2 chevaux Citroën… Première station : la célèbre pagode Mahamuni Paya. Deuxième haut lieu de pèlerinage après celle de Yangon, cette pagode est remarquable par son immense et antique Bouddha de 4m de haut et totalement recouvert de feuilles d’or. Avec les années et les couches superposées, on distingue de moins en moins bien ses formes (il a les doigts tout boudinés et quasi collés les uns aux autres) mais il règne ici une ferveur bien palpable. Les hommes de la famille sont invités à s’approcher de la statue afin d’observer les fidèles en pleine application du métal précieux tandis que nous les filles restons sagement en retrait (l’endroit est interdit aux « ladies » comme l’annonce un panneau en anglais) ruminant sur l’inégalité des sexes… Dans les allées adjacentes, notre chauffeur nous montre des photos du leader de la junte birmane en pèlerinage avec toute sa famille. Hochements de tête polis de notre part (on ne va se compromettre et prendre des positions hasardeuse maintenant), mais notre guide se penche et souffle dans l’oreille d’Edgar « Governement no good ». Plus tard, à l’abri de l’habitacle du taxi et avec les quelques rudiments d’anglais qu’il maitrise, il explique que les militaires et la police prennent de l’argent partout, qu’ils sont très riches et que leurs espoirs reposent sur Aung San Suu Kyi (la célèbre dissidente, prix Nobel de la paix et récemment relâchée après avoir passé plus de 7 ans assignée à résidence). Il est très dangereux pour les Birmans de parler de politique en public, surtout à des étrangers car le système d’espionnage est efficace et partout présent… Ceci dit, tous les Birmans avec qui nous avons échangé nous ont glissé à un moment ou un autre « Governement/army not good ». Le temps des confidences passé, nous abordons la ville de Sagaing et sa fameuse colline. Comme la montée est réputé difficile, nous laissons le moins motivé (Calixte) en bas avec le chauffeur. En effet, l’ascension est harassante, abrupte sous une chaleur terrible, nous arrivons tous les trois dégoulinants de sueur, la langue pendante mais le panorama en haut vaut l’effort : d’innombrables stupas dorés entourés d’arbres en fleurs se profilent aux alentours tandis qu’au loin les ponts en fer enjambent la rivière Ayeyarwady. C’est superbe ! Et, alors que nous nous préparons à redescendre, voilà que débouchent en haut des marches, notre petit Calixte, accompagné de notre conducteur, tout heureux de nos mines surprises Après un repas marqué par une démonstration de gentillesse du restaurateur qui offre un tee shirt marcel à Edgar (avec une pub pour une bière locale au dos !!), nous rejoignons la ville d’Inwa. Adorable petit village qui fut capitale du royaume pendant 400 ans, accessible uniquement par bateau et dont les principaux vestiges se visitent à bord de calèches brinquebalantes sur des routes cabossées. Pagode, tour de guet et encore un sublime monastère en teck où officie un moine maître d’école achèvent de nous ravir ! Nous terminons cette journée bien remplie par Amarapura et une promenade sur le pont U Bein, le pont en teck le plus long du monde (1,2 km et 1000 plots en bois). Cet ouvrage de plus de 200 ans est uniquement piéton et nous permet d’observer la vie quotidienne des habitants de la région : pêcheurs, fermiers moissonnant le riz manuellement, berger faisant traverser un troupeau de zébus à la nage, moines traversant le pont, la tête protégée du soleil par un pan de leur robe…Il y a tant de sujets d’étonnement et de paysages admirables ! Quelle frustration de ne pas pouvoir vous joindre les photos… Nous rentrons enfin au bercail et préparons nos sacs pour un départ tôt le lendemain, en bus, pour Bagan.

7 commentaires:

  1. Avec wikipedia et différents blogs on arrive a retrouver les photos des sites que vous visitez, et vos posts sont suffisament parlants pour que l'on puisse vous mettre en situation, facile par exemple d'imaginer Calixte arrivant en haut des marches, etc. Aussi on vous encourage à continuer malgré les difficultés ce blog si attendu. Merci. Baisers à tous. Michel

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  2. Les vincennois16 mai 2011 à 13:49

    Hello,
    bien contents de lire de vos nouvelles. On vous espère tous en forme, Calixte a-t-il bien récupéré ? Et on espère voir Edgar avec son nouveau T-shirt prochainement ;-)... ainsi que les autres photos. Ici, il ne pleut pas beaucoup non plus, mais il fait un peu moins chaud...
    bises
    Laurence, André, Nicolas et Marguerite

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  3. Je pense qu'en rentrant Edgard devra faire figurer sur son CV: "ai réussi à bloguer de Birmanie: expert en contournements Internet"!
    Bonne continuation. J'attends avec impatience la suite. Non, non, je ne vous mets pas la pression...
    Christine.

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  4. Merci pour ces nouvelles tant attendues.C est dans le catalogue de l'agence de voyage que nous vous suivons,mais nous attendons vos photos qui serons plus intéressantes et plus personnelles.Calixte aime bien faire des surprises!!!il devait être rayonnant là-haut. Nous vous embrassons bien fort tous les quatre.Grand-Papa et Grand-Maman

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  5. J'ai l'impression que vous passez des moments assez incroyables et inoubliables en Birmanie. Lucile, je suis impressionnée par ta prose réellement, vas-tu continuer à écrire à ton retour ? Ce voyage t'inspirera très certainement...
    Sinon on voudrait tous voir Edgar avec son nouveau Marcel !
    Grosses biz à tous les 4.
    Flo

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  6. Malgrè la qualité de vos descriptions, je serais heureuse de voir quelques photos de l'une et l'autre des artistes ! Je vais m'informer à Nantes pour accèder à ce site.
    Quel petit malin ce Calixte.
    Amitiés - Tante B.

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  7. Famille Galopin (enfin, la mère)18 mai 2011 à 13:12

    Moi aussi, j'avoue que le marcel me laisse sans voix... J'ai hâte de le voir sur Edgar, et assis à une Mazda ce serait encore mieux !!

    Les photos me manquent, mais mon imagination fonctionne à fond avec toutes ces aventures !

    Bises à vous 4

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